09/12/2024
Le végétarisme des Lumières
Cet ouvrage ne traite pas de la thématique du végétarisme spécifiquement durant le siècle des Lumières (le XVIIIe) mais de l'idée de végétarisme en Occident, à travers les siècles et par le biais de réflexions pointues sur quelques idées liées de près à la question du végétarisme, ce qui ne le rend pas moins intéressant. Et comme trois chapitres au moins sont intimement associés au XVIIIe, on peut dire qu'il s'agit "presque" du végétarisme durant les Lumières (Rousseau et Voltaire auraient pu être inclus dans le même chapitre...).
C'est ainsi qu'après une longue introduction posant, notamment, le contexte et les enjeux du végétarisme moderne, après avoir rappelé les quatre motivations principales d'un régime végétarien (à avoir l'ascétisme, la diététique, l'ethique et la religion), la question du végétarisme est abordée en cinq chapitres constituant autant de points d'entrée pour comprendre historiquement et globalement le phénomène : la querelle des médecins au XVIIIe siècle quant aux questions de digestion et régime alimentaire à aborder, le débat sur l'aspect moral associé (ou pas) à l'exécution d'animaux, la géographie du végétarisme (notamment l'Inde), et dans les deux dernières parties, le végétarisme mis respectivement en avant par Voltaire et Rousseau. La réflexion est instructive, incisive et globale. Bref, un livre passionnant, qui ravira ceux qui s'intéressent à la question. JM Naoufal
Renan Larue, Le Végétarisme des Lumières, Paris, Classiques Garnier, 2021, 257 p.
20:04 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : végétarisme, lumières, renan larue, rousseau, voltire, pythagore, inde, véganisme, animaux, droit des animaux, plutarque, hecquet
06/07/2021
What the health
What the health (un jeu de mot malin pour attirer) fait partie de ces documentaires traitant des dangers sanitaires liés à la consommation de nourriture industrielle. Tandis que Food Inc. dénonçait les méthodes modernes de l'industrie agro-alimentaire et plaidait pour une consommation plus saine, et que le révoltant We feed the world mettait en exergue les pratiques de cette même industrie qui profitent en termes d'alimentation aux pays riches et paupérisent les pays en développement, Superzine me tirait à boulets rouges sur le fast food, son réalisateur allant même faire lui-même un régime MacDo durant un mois pour prouver la nocivité rapide de ce type de consommation.
Rappelant qu'il y a dans le monde 315 millions de diabétiques, ce docu réquisitoire et plaidoyer à la fois alerte sur l'impact des produits laitiers, de la viande et du poisson sur la santé, stigmatise la collusion entre industrie pharmaceutique et associations de lutte contre le diabète d'une part et industrie agro-alimentaire d'autre part, et fait l'apologie à la fin d'un régime alimentaire basé sur la consommation de tout ce qui provient des plantes, promouvant au passage le véganisme.
Sans doute, la dimension la plus pertinente du documentaire est la collusion entre les diverses industries au pays du mercantilisme et du capitalisme ultra-sauvage. Nous apprenons par exemple que des associations réputées comme l'Association Américaine de lutte contre le diabète proposent sur leur sites internet des régimes alimentaires basés sur la viande. Plus consternant est le fait que les membres du Comité du ministère de la santé qui propose chaque année des régimes spécifiques, sont financés par les géants de l'agroalimentaire (McDo, Mars, Danone, Hershey, KFC, Tyson pour ne citer que ceux-là.
Plus problématique par contre est le traitement de la question de l'impact des produits en question sur la santé. S'il est bien expliqué à travers schémas animés comment surviennent certaines maladies (notamment le diabète) et leur impact sur le corps humain, l'approche scientifique n'est pas assez pointue pour étayer l'argument de la nocivité de certains produits. C'est ce qui a d'ailleurs été reproché au documentaire qui a subi la foudre de médecins, diététitiens et journalistes d'investigation qui fustigent des raccourcis faciles, la mise en avant d'études de santé pas nécessairement pertinentes, et l'utilisation intensive du "cherry picking" (mettre en avant des faits qui crédibilisent son opinion en laissant de côté des éléments qui la contredisent), nonobstant la complexité de la question.
Il est vrai que le cherry picking est flagrant et son objectif est évidemment de convaincre, ce que réussit le documentaire non dépourvu d'une grosse tendance propagandiste. Cela est visible à son slogan de promotion ("The Helath Film that Health Organizations don't Want You to See") et de sa manière de faire l'apologie du véganisme. A notre sens, il y a une autre manière de promouvoir le véganisme (qui ne nous pose pas problème, l'étant quasiment), qui n'est pas adapté aux enfants et certainement pas à n'importe quel adulte.
Restons nuancés. Il y a du bon et du moins bon dans ce documentaire qui nous apprend beaucoup de choses mais qui en raison de son objectif principal (promouvoir le véganisme) use de raccourcis scientifiques, de raisonnements discutables et de biais de confirmation pour convaincre de sa détention de la réalité absolue. Les trois dimensions traitées doivent l'être séparément : la collusion entre industries de la santé et industrie agroalimentaire ("tout n'est qu'un business"), le problème du diabète et son lien avec certains types de produits, et la question des bienfaits du véganisme. Mot de la fin : instructif mais à regarder avec des pincettes et un esprit critique. J N
What the Health (Kip Andersen, Keegan Kuhn, USA, 2017, 92 min)
08:00 Publié dans Documentaire, Film | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : kip andersen, keegan kuhn, vegan, véganisme, what the health, diabète, industrie agro-alimentaire, cherry picking, produits laitiers, biais de confirmation