23/05/2018
Introduction à Antonio Gramsci
"Nous devons empêcher ce cerveau de fonctionner pendant vingt ans"
Michele Isgro, procureur fasciste, lors de la condamnation de Gramsci, le 4 juin 1928.
Fondateur en 1921 du Parti communiste italien, Antonio Gramsci (1891-1937) n'a pas produit de théorie propre mais ses réflexions (écrites en code durant ses années passées en prison) ont été des sources d'influence (encore d'actualité) pour la théorie politique et économique, pour la philosophique et inspirèrent de même l'approche néo-marxiste des relations internationales.
On lui doit notamment le concept d'"hégémonie culturelle". Gramsci s'était posé une question essentielle : pourquoi n'y-a-t-il pas de révolution communiste en Europe occidentale (comme en Russie) ? Ce fait signifie qu'il y a un défaut dans l'analyse marxiste et pour répondre à cela, Gramsci utilise le concept d'"hégémonie culturelle". Sa conception de la puissance est inspirée de celle de Machiavel : un mélange de coercition et de consentement. Pour comprendre comment l'ordre traditionnel (capitaliste) s'est maintenu, les penseurs marxistes se sont exclusivement concentrés sur les capacités et pratiques coercitives de l'Etat (décrit par Engels comme une machine d'oppression d'une classe par une autre). Ce serait donc la peur de la coercition qui a maintenu les classes exploitées dans une situation d'oppression et qui les a empêchés de se révolter.
Selon Gramsci, la coercition a certes joué un rôle mais le consentement également. Celui-ci est créé et recréé par l'hégémonie de la couche sociale dominante. C'est cette hégémonie qui permet aux valeurs des classes dominantes de se répandre et se greffer au sein des couches sociales dominées. Cela se fait à travers les institutions de la société civile (médias, Eglise...etc.).
Gramsci utilisa le terme "bloc historique" pour décrire les relations réciproques et se renforçant mutuellement, entre la sphère socio-économique (base) et les pratiques politique et culturelle (superstructure) qui forment ensemble un ordre. C'est l'interaction entre les relations économiques et la politique et les idées qui est importante.
En prison - où il décèdera - Gramsci avait écrit en code. Ses écrits sont donc fragmentaires et sujets à différentes interprétations. C'est ainsi qu'il est bien de le lire directement (lire par exemple "Guerre de mouvement et guerre de position - Textes choisis et présentés par Ramzig Keucheyan - La Fabrique, 2011) mais de lire également cet ouvrage où les deux auteurs nous expliquent en 5 chapitres (de manière très claire et accessible) les concepts-clé que cet auteur culte a développés. Un ouvrage précieux. J. N
George Hoare, Nathan Sperber, Introduction à Antonio Gramsci, Paris, La Découverte, Repères, 2013, 125 p.
10:20 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : antonio gramsci, introduction à antonio gramsci, george hoare, nathan sperber, hégémonie culturelle, philosophie, relations internationales, sociologie