28/02/2025
Le crépuscule des chimères
"La nuit était un puits de cendres. Des veines de braise, néon rougeoyants, pulsaient tels de gros insectes phosphorescents sur les façades calcinées des immeubles. [...]
Le sang bouillonnait entre ses seins. Il n'arrivait pas à le contenir. Des décharges épileptiques cambraient son corps qui se vidait comme une truie fraîchement surinée. [...] Elle était immobile. Nourrisson mort-né recouvert d'un habit rouge et gluant, Christ transsexuel d'une moderne Piéta. [...]
Les grues capturaient d'énormes insectes gorgés de luciférine pour combattre l'assaut de la nuit. Des nébuleuses vivantes plongeaient dans l'eau noire pour réchauffer la coeur de la ville. [...] "
Ce qui est considéré comme le roman le plus ambitieux de Barbéri est, en effet, très imagé, sensoriel, lugubrement poétique par endroits. Il y a des livres de SF qui ne sont pas évidents à lire, celui-ci en fait partie. Non pas en raison de la narration mais en raison des nombreuses dimensions que prend cette SF à la fois dark, sexuelle, grinçante et surtout, transgressive. Entre hallucinations horrifiques et fantasmagorie, délires mystiques, thriller psychologique et même eugénisme, c'est beaucoup de thématiques qui s'emboitent, quitte à vous perdre par moments. Mais pour une raison qui m'échappe, j'ai plutôt adhéré. et c'est toujours une bonne chose de trouver la première édition (et à prix réduit) de ce livre désormais publié aux coûteuses éditions La Volte. JM Naoufal
Jacques Barbéri, Le crépuscule des chimères, Flammarion (Imagine), 2002, 296 p.
20:45 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jacques barbéri, le crépuscule des chimères, sf, science-fiction
06/10/2021
Mondocane
Encore et toujours ces hasards que nous aimons bien. Encore un auteur de SF confirmé depuis un moment déjà et que nous avons découvert il y a quelques temps seulement, dans une librairie d'un pays certes francophone (au Moyen-Orient) mais où il n'y a quasiment pas de public pour la Science-Fiction, catégorie littéraire au "style très codifié" disait N. En termes de hasard, on découvrait également que l'auteur - publié chez La Volte depuis la fin des années 2000 - était né à Nice, la ville où on se rendait pour la première fois. On s'est étonné d'avoir pu abattre la moitié de ce roman de SF décousue durant ce vol de nuit de 04h30.
Il faut dire que l'univers de l'auteur était présenté comme proche de celui de Philip K. Dick (1), notre auteur préféré, et que ses thématiques le rapprochaient de même de notre cinéaste préféré, David Cronenberg. La messe était dite. Plus aucune hésitation possible. Un monde aseptisé mais distordu à souhait et géré par les intelligences artificielles Petit Poucet et Guerre et Paix. Préserver la race humaine. Mais peut-on encore parler de "race" ou d'"espèce" à l'heure de la recomposition permanente? Dans ce spectacle fantasmagorique où parler de désespoir humain dans un monde post-apocalyptique serait un euphémisme, Jack Ebner se réveille après 7 ans ce cryogénisation. Un monde qui lui est inconnu mais qui ne l'empêche pas de s'enfoncer dans sa quête désespérée. Il faut avoir beaucoup de talent et une imagination puissante pour concocter du post-cyberpunk retourné dans tous les sens. De la grande SF sombre et surréaliste que nous aurions sans doute gagné à lire dans un contexte plus tranquille. Un récit inoubliable. J. N.
Jacques Barbéri, Mondocane, Folio SF, 2018, 277 p.
(Publié pour la première fois aux éditions La Volte en 2016)
(1) Le dieu venu du centaure (1965), un des romans phares de Philip K. Dick aurait définitivement fait pencher Barbéri vers l'écriture de la SF durant les années 1970. Il rédigera en 2010 Le tueur venu du Centaure...
10:26 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jacques barbéri, mondocane, science-fiction, monde post-apocalyptique, post-cyberpunk