30/09/2021
L'étoile et le fouet
En attendant d'aller regarder Dune (pass sanitaire oblige...), nouvelle adaptation du chef-d'oeuvre incontournable de Frank Herbert, nous avions décidé de lire une saga moins connue, notre première de l'auteur. L'étoile et le fouet - traduction imparfaite mais obligée de Whipping Star... - est le premier volet du Cycle des Saboteurs (titre original : ConSentiency), écrit en 1973 et 1979 (The Dosadi Experiment constitue le volet 2) mais fréfigurée par deux nouvelles, écrites en 1958 (Tracer son sillon) et 1964 (Délicatesse de terroristes).
Au menu : univers de la CoSentience, Bureau du Sabotage, couloirs S'oeils... Les autorités n'ont d'autre choix que d'envoyer en mission Jorj X. McKie, saboteur Extraordinaire, auprès d'une Calibane, pour un résoudre un problème urgent : l'augmentation vertigineuse de suicides de Calibans un peu partout dans l'univers. Le problème est d'autant plus grave que ces derniers sont les seuls qui maîtrisent les couloirs S'oeils permettant de se déplacer instantanément à travers la galaxie. On retrouve à travers ce récit d'êtres omnipotents bien malgré eux un thème central (et jamais épuisé) chez Frank Herbert, celui de la divinité. Apparaît également l'autre thème central, problème ô combien fondamental aujourd'hui, la communication, à la fois pierre angulaire et noeud gordien de sociétés qui n'en finissent pas de dépérir. De la SF complexe et intellectualisée. Comme on l'aime.
J. N.
Frank Herbert, L'étoile et le fouet, Le Livre de Poche, 2018, 219 p.
(publié pour la première fois en 1973 sous le titre original Whipping Star)
12:31 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : frank herbert, science-fiction, l'étoile et le fouet, whipping star, communication, divinité
20/09/2021
L'homme stochastique
Il faut dire que cela faisait un bail que nous n'avions plus lu un de nos auteurs fétiches de SF. Nous sommes tombés par hasard sur ce roman dans une librairie où nous ne nous attendions pas trouver de la science-fiction, découvrant au passage cette collection SF de Robert Laffont. Notre dernier commentaire sur Silverberg remontait tout de même à début 2015, avec Le Temps des changements, véritable tour de force à notre sens. Nos premiers commentaires concernaient deux romans cultes, L'oreille interne et L'homme dans le labyrinthe. Faute de temps, nous n'avons jamais pu nous atteler à la lecture du Cycle de Majipoor.
La stochastique, définie simplement comme l'art de conjecturer, est le talent que possède Lew Nichols. Cette prouesse lui permet d'être recruté comme conseiller politique de Paul Quinn qui vise la mairie de New York puis carrément la Maison-Blanche. Nichols a tout pour monter en grade mais voilà que fait irruption dans sa vie l'énigmatique Carvajal, capable tout simplement de lire l'avenir et prêt à lui transmettre ce don ô combien convoité...
Consacré Grand Maître de la science-fiction en 2003, Robert Silverberg propose ici une réflexion pertinente sur les concepts de déterminisme et de libre-arbitre, qui n'est pas sans rappeler Les chaînes de l'avenir de Philip K. Dick. Etrangement, le récit en soi, centré sur la stratégie politique, rappelle quant à lui, le premier roman de Dick, Loterie solaire (1955). Cette sorte de "mix" entre deux oeuvres de notre auteur préféré de SF ne nous a pas empêché de lire ce livre d'une traite et avec plaisir. J. N.
Robert Silverberg, L'homme stochastique, Robert Laffont, Pavillons Poche Imaginaire, 2019 (1977), 355 p.
Publié pour la première fois en 1975 sous le titre original The Stochastic Man.
14:35 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : science-fiction, robert silverberg, l'homme stochastique, libre-arbitre, déterminisme, renaissance spirituelle, silverberg, prédire l'avenir
15/12/2020
Les mondes de Philip K. Dick
Fait assez rare pour être cité, nous avons offert la semaine passée deux livres de Philip K. Dick (deux recueils de nouvelles, FOLIO SF) de notre collection sacrée à deux de nos élèves en Première HGGSP. J'avais eu l'agréable surprise de les entendre discuter à la pause du thème de la dystopie, terme que ne connait pas la quasi-majorité des ados de cette âge-lâ (génération d'écervelés par ailleurs). L'occasion de revenir sur ce documentaire consacré à Dick par ARTE en 2015.
On apprend ici sur la vie de Philip K. Dick, la psychose qui travaillait son œuvre, l'essence de celle-ci et l'apport inestimable qu'elle apporta au genre de la science-fiction, et son obsession avec l'intelligence artificielle. Nous ne revenons pas longuement sur son œuvre, l'ayant déjà effectué dans nos nombreux commentaires sur ses romans, notamment notre première note dont le point de départ était Substance mort.
Le documentaire est traversé par le témoignage de la seconde femme de Dick, Tessa, par des commentaires d'auteurs de SF comme David Brin qui affirme qu'"il n'écrivait pas des romans basés sur l'horreur mais plutôt sur la sinistre sensation que toutes nos certitudes sont bâties sur du sable", mais également par des citations (accompagnées d'extraits vidéos) des œuvres de Dick, notamment Blade Runner, Minority Report, Ubik, Le dieu venu du centaure, Le bal des schizos, Simulacres...etc.
Sans doute, c'est un peu court (55 min) mais cela demeure un très bon condensé de la vie et de l'œuvre de celui "dont l'œuvre a anticipé comme aucune autre le monde paranoïaque et technologique de notre XXIème siècle". Pour comprendre avec plus d'acuité la vie et toute la dimension du chef-d'oeuvre dickien, il faudra lire les biographies qui lui sont dédiées en anglais, ou celle, excellente et en français, d'Emmanuel Carrère, Je suis vivant et vous êtes morts. J. N
Les mondes de Philip K. Dick (2016, 55 min)
Scénaristes : Yann Coquart, Ariel Kyrou
Production : ARTE Production, Nova Production
11:47 Publié dans Documentaire, Film | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : philip k. dick, mondes parallèles, les mondes de philip k. dick, arte, science-fiction, anticipation, yann coquart, ariel kyrou
21/11/2020
Raised by Wolves
Il faut reconnaître qu'on ne s'attendait pas à grand chose d'une série de science-fiction liée à Ridley Scott (producteur exécutif et réalisateur des épisodes 1 et 2 tandis que son fils Luke a réalisé les épisodes 3, 4 et 10), vu que le réalisateur des cultes Alien et Blade Runner est sur le déclin depuis un bon moment déjà (vu ses 82 ans, c'est compréhensible) et que ses derniers opus SF n'étaient pas spécialement incisifs (Prometheus (2012), Alien: Covenant (2017). Mais au final, nous avons été agréablement surpris par cette série diffusée par le nouveau service de vidéo à la demande, affilié à HBO, HBO Max (il va bien falloir tenir la concurrence face à Netflix, Amazon, Apple+ et les autres).
XXIIème siècle. Tandis que la Terre a été détruite par la Grande guerre, deux androïdes - Mother and Father - élèvent des enfants sur la planète Kepler-22-b. Mais la colonie humaine débarque et son fanatisme religieux mortifère n'annonce rien de reluisant... Dans cette atmosphère minimaliste et aseptisée (des classiques de la SF), arride et hostile, l'angle d'attaque est osé mais plutôt réussi : soit la confrontation entre la dystopie humaine et l'utopie cybernétique. On retrouve ici la patte de Ridley "Blade Runner" Scott, où ces deux machines sont finalement plus attachantes que les envahisseurs humanoïdes, incapables de s'extirper de cet "opium des peuples" (ce qui explique peut-être que la psychologie des personnages est peu travaillée). La vision de l'avenir est sombre, fascinante et brutale, et nous y adhérons pleinement.
Petit bémol : après avoir couvert beaucoup de terrain durant les premiers épisodes, le scénario s'essoufle vers la fin. C'est dommage. Mais cela n'empêche pas ce récit complexe et cérébral d'apporter un vent de fraîcheur à l'univers de la science-fiction. Malgré ses imperfections, la série vaut largement le détour et nous attendons la suite avec curiosité. J N
Raised by Wolves
(10 épisodes diffusiés du 3 septembre au 1er octobre 2020)
Production : HBO Max
Création : Aaron Guzilowski
Cast : Travis Fimmel, Amanda Collin, Abubakar Salim, Winta McGrath, Niamh Algar, Jordan Loughran.
22:14 Publié dans Series | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : raised by wolves, hbo max, science-fiction, ridley scott, luke scott, dystopie, blade runner, aaron guzilowski, travis fimmel, amanda collin, abubakar salim, winta mcgrath
23/04/2020
Ce qui mordait le ciel...
C'est lors d'un récent voyage qui nous a fait traverser la Tchéquie, la Pologne et la Slovaquie que nous avons lu notre quatrième roman de science-fiction - après Le syndrome du scaphandrier, Boulevard des banquises et La nuit du bombardier - de Serge Brussolo que nous considérons être un peu le Philip K. Dick de la SF made in France. Ce récit paru pour la première fois en 1984 raconte le périple de David. Au bord de la rupture et travaillant pour la Compagnie Intergalactique de Pompes Funèbres, celui-ci est dépêché d'urgence sur la planète Sumar. Sur celle-ci, a été expédié par erreur un produit destiné à développer autour du cadavre un agglomérat cristallin indestructible. Spécialisée dans les rites funéraires, la CIPF entend régler rapidement cette erreur de livraison, d'autant plus que ledit produit a vacciné des espèces de bêtes géantes, les thomocks, entraînant la dispersion dans l'espace de gigantesques masses cristallines. Cette situation dérègle au passage la vie des locaux qui doivent s'adapter tant bien que mal et David se retrouve au milieu de cette atmosphère de mutation hallucinée...
Nous devons reconnaître que nous avons eu un peu de mal à suivre le récit - moins aisé à lire que les œuvres citées - plus particulièrement après l'arrivée du principal protagoniste sur Sumar. Mais qu'importe, on retrouve ici l'imagination débordante qui a fait la notoriété de l'auteur, entre visions fantasmagoriques, situations lugubres et comportements morbides. On retrouve en fait les thèmes classiques de la SF de Brussolo : une société coupée du monde, un héros (ou anti-héros, c'est selon) au bord de la déchéance, l'humour noir, une humanité en décrépitude (que la pandémie actuelle du Covid-19 a, selon nous, mis en exergue...). S'il n'est pas notre roman SF préféré de l'auteur (mais nous n'en n'avons pas lu assez), une constatation nous vient tout de même à l'esprit : comment se fait-il que de telles oeuvres ne soient pas adaptées au cinéma (même constat pour le génial Christopher Priest) lorsque nous réalisons bien que la Science-Fiction n'a pas souvent fait d'éclats au cinéma? A ce propos, Michel Bussi déclare que Serge Brussolo "a un peu le statut d'artiste maudit, peut-être parce qu'il n'a pas été adapté au cinéma"... J. N
Serge Brussolo, Ce qui mordait le ciel..., FOLIO SF, 2006 (1984), 216 p.
14:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : serge brussolo, science-fiction, sumar, thomoks, michel bussi, compagnie intergalactique de pompes funèbres, rite funéraire