12/06/2019
Chernobyl : HBO is Back
Le 26 avril 1986 survenait la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, plus grand accident nucléaire du XXème siècle. Celui-ci se déroulait non pas à Tchernobyl même (ville située à 96 km au nord de Kiev, capitale actuelle de l'Ukraine) mais à Prypiat, ville fondée en 1970 et située à 3 km de la centrale nucléaire et à 10 km au nord de Tchernobyl. En raison de la zone d'exclusion de 30 km mise en place autour de la centrale suite à l'accident, Prypiat est désormais inhabitée et constitue une "ville fantôme".
L'accident a été provoqué par l'augmentation incontrôlée de la puissance du réacteur n°4 , conduisant à la fusion du cœur. Cela entraîna le craquage de l'eau des circuits de refroidissement, entraînant un explosion et la libération d'importantes quantités d'éléments radioactifs dans l'atmosphère, provoquant une très large contamination de l'environnement.
Cela faisait un moment que la chaîne culte HBO ne nous avait proposé quelque chose de transcendant dans la catégorie 'drame'. Celle qui inaugura les séries à épisodes d'une heure (OZ, 1997-2003), qui concocta la meilleure série de tous les temps (The Wire, 2002-2008) et qui vient de boucler la mythique Game of Thrones (diffusée dans 173 pays) semblait être relativement en perte de vitesse face aux productions solides des chaînes (AMC, Showtime, Starz et autres) ou sites (Netflix, Amazon) concurrents. En effet, si la saison 1 de True Detective (2014-2018) était brillante, elle comportait toutefois un bémol majeur : le peu de caractères féminins. Par ailleurs, le ratage total de la saison 2 (innover tout en restant dans la logique de la saison 1) et la déception de la saison 3 (ça manque cruellement de rythme) "baissaient" la note de cette série-anthologie.
Il faut dire qu'il était difficile de faire aussi bien que le foisonnement brillant des années 2000. Citons sans exhaustivité la fable sociale The Sopranos (1999-2004), Six Feet Under (2001-2005), les mini-séries de guerre (Band of Brothers, 2001 ; Generation Kill, 2008 ; The Pacific, 2010), la poétique Deadwood (2004-2006), arrêtée faute de budget, l'ultraréalisme de Rome (2005-2007), également stoppée faute de moyens, l'univers mormon de Big Love (2006-2011), les vampires sexy de True Blood (2008-2014)...etc.
Pour la décennie en cours, nous avons été secoués par l'extrémisme de The Leftovers (2014-2017), épatés par la réflexion décalée sur le pape de The Young Pope (2017), ennuyés par Show me a hero (2015), Big Little Lies (2017 - ) et The Deuce (2017- ), même si le thème traité par la troisième citée (l'ascension de l'industrie porno à New York durant les années 1970) est intéressant en soi, et sans avis sur l'univers familial et sans pitié de la haute finance dans Succession (2018- ). Quant à la géniale Westworld (2016- ), une des meilleures productions HBO de ces dernières années, à notre sens, nous la classons à part pour son côté surréel (même chose pour Carnivale (2003-2005) et sa dimension surnaturelle).
Quatre éléments essentiels font de Chernobyl une mini-série brillante : une reconstitution minutieuse du drame conjuguée à une explication technique claire (permettant aux néophytes dont nous faisons partie de s'y retrouver), un récit poignant rendant hommage à toutes ces personnes touchées de près ou de loin par le drame (des pompiers - premiers arrivés sur les lieux et contaminés de manière effroyable - aux scientifiques déchus pour avoir dit la vérité), une narration à la fois palpitante et angoissante (comme seule sait le faire HBO...), et enfin l'atmosphère délétère (magnifique photographie) d'une Union soviétique en pleine déliquescence. Dans ce sens, Chernobyl est également une allégorie d'un système socio-politique qui ne fonctionnait plus. Arrivé au pouvoir en mars 1985 (soit un an avant le drame), l'ancien premier secrétaire du Parti communiste d'Union soviétique (1985-1991), Mikhaïl Gorbatchev tentait en vain de stopper hémorragie (avec les fameuses perestroïka et glasnot). En 2006, il écrivait que "c'est peut-être le drame de Tchernobyl qui a causé l'effondrement de l'URSS". Tandis que cette tragédie mettait en exergue l'impéritie et l'incurie d'une administration soviétique autoproclamée omnisciente, elle menait dans le même temps à la mort (directe et indirecte) de 4000 à 93.000 personnes d'après des études scientifiques. Aujourd'hui, le nombre officiel (établi en 1987) est toujours de 31 morts...
Si nous affirmions que Chernobyl est la meilleure production HBO depuis The Wire, c'est parce que nous considérons que Game of Thrones avait perdu de sa splendeur à partir de la saison 5, moment à partir duquel la série dévie ostensiblement du roman, pression des producteurs et des fans (entre autres) oblige... Cela ne change pas le fait que cette série demeure avec The Wire et Breaking Bad (AMC) les trois séries que nous notons 10/10 sur le site IMDB, auxquelles nous ajoutons désormais Chernobyl. Cette dernière est d'ailleurs la série la mieux notée actuellement sur IMDB avec une moyenne de 9.6, devant Breaking Bad (9.5), Game of Thrones (9.4) et The Wire (9.3). Il faut toutefois noter que les deux premières enregistrent respectivement 1.217.789 et 1.548.207 votants tandis que Chernobyl n'en enregistre pour le moment que 219.046 (moins connue du grand public, The Wire enregistre pour sa part 246.667 votes).
Enfin, côté russe, les médias n'ont pas apprécié et ont qualifié la série d'être grosso modo de la propagande anti-russe. A l'heure de la nouvelle guerre froide entre Russes et Américains, la réaction est fort logique... J N
CHERNOBYL (HBO, 5 épisodes, 6 mai - 3 juin 2019)
- Création : Craig Mazin.
- Réalisateur : Johan Renck.
- Cast : Jared Harris, Stellan Skarsgard, Emily Watson, Paul Ritter, Adam Nagaitis, Con O'Neill, Jessie Buckley, Sam Troughton.
16:09 Publié dans Series | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : hbo, chernobyl, catastrophe de tchernobyl, jared harris, emma thompson, union soviétique, urss, ukraine, russie, mikhaïl gorbatchev, catastrophe écologique, réacteur n°4, the wire, breaking bad, game of thrones
01/04/2018
Limonov
C'est un personnage complexe, fascinant et polymorphe dont l'écrivain et réalisateur français Emmanuel Carrère dresse une biographie romancée. Truand à Kharkov (Ukraine), poète à Moscou, SDF puis domestique d'un milliardaire à New York (années 1970), écrivain et journaliste à Paris (années 1980), dissident puis prisonnier politique en ex-URSS, Limonov fonde en Russie le Parti national-bolchevique (1993), à l'heure où les idéologies politiques se cherchent un nouveau souffle (l'URSS n'est plus et la guerre froide est terminée) et viennent même à se mélanger. On parle à cette époque d'alliance "rouge-brun". En 2012, Edouard Limonov, personnage haut en couleurs, tente même - en vain - de se présenter à l'élection présidentielle russe de 2012.
Auparavant, il est en Bosnie-Herzégovine lors de la guerre civile (1992-1995). Les images vidéo le montrent discutant avec Radovan Karadzic (dont les troupes serbes font le siège de Sarajevo) puis tirant une rafale de kalachnikov en direction de la ville-martyr qui subit plus de trois mois de siège militaire. Après cet épisode, l'écrivain sulfureux n'est plus édité en France et tombe dans l'oubli. C'est justement le livre de Carrère - lauréat du Prix Renaudot en 2011 - qui refait parler de Limonov, le réhabilitant relativement (certains de ces romans sont réédités en France).
Au-delà d'un récit sur la trajectoire trouble d'un personnage hors du commun, détestable et attachant à la fois, ce roman est beaucoup de choses. D'après Emmanuel Carrère, la vie de Limonov "symbolise bien les rebondissements de la seconde partie du XXème siècle". En effet, hormis un essai sur la Russie du XXème siècle, le récit fournit des clés de compréhension sur le basculement du monde sociopolitique à la fin du XXème siècle. Nous avons été littéralement transportés par cette histoire passionnante de bout en bout et fort instructive. J. N, N. A.
Emmanuel Carrère, Limonov, FOLIO, 2013 (édité pour la première fois en 2011), 489 p.
12:53 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : limonov, russie, urss, emmanuel carrère, prix renaudot
26/06/2017
Magnitogorsk
Toujours dans la catégorie "villes industrielles russes", si Chouïa est dédiée au savon, la ville de Magnitogorsk (située dans l'Oblast de Tcheliabinsk, au nord du Kazakhstan et à 1200 km de Moscou) est consacréee à la sidérurgie, où est localisé le Combinat méttalurgique de Magnitogorsk, fondé en 1929 puis privatisé en 1992, à la suite de l'effondrement de l'Union soviétique. En 1937, dans un climat de purges staliniennes, Magnitogorsk fut déclarée ville fermée. Pour cette raison, il n'y a pas d'informations fiables sur l'évolution de ce bassin industriel à partir de cette date et jusqu'en 1991 (date de l'abolition du statut de ville fermée). Concernant ce drapeau assez "dark" (c'est selon) l'habileté de ses créateurs à mettre en avant, de par sa structure simple (2 éléments : un triangle noir sur fond gris), plusieurs symboles. Tandis que les angles du triangle renvoient aux tentes des pionniers qui fondèrent la ville en 1743, celui-ci symbolise avec sa couleur noire la montagne Magnitnaïa (d'où est issu le fer) mais aussi la ville de Magnitogorsk comme centre industriel. Comme "triade équilatérale", le triangle est symbole de détermination, vigueur et quête de l'excellence. Quant aux couleurs, le noir renvoie à l'honnêteté, la sagesse, l'humilité et la vie éternelle, et le gris à la pureté, la noblesse (comme bonté), la justice et la générosité. Adopté officiellement le 28 janvier 2004, le drapeau (proportions 2:3) fut modifié en novembre 2010 puis en avril 2011. J. N, N. A.
15:22 Publié dans Drapeau | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : magnitogorsk, sujet fédéral de russie, oblast de tcheliabinsk, fer, sidérurgie, magnitnaïa, ville fermée, ville industrielle russe, russie, urss, ville russe, drapeau russe
08/12/2013
Stalingrad
Le 22 juin 1941, Adolf Hitler lançait la fameuse opération Barbarossa, le plan d'invasion de l'Union soviétique, ouvrant ainsi le front de l'Est qui allait devenir le principal et le plus sanglant théâtre d'affrontement de la seconde guerre mondiale (l'armée allemande y subira 80% de ses pertes). La plus grande concentration de soldats au sol dans l'histoire militaire mondiale (plus de trois millions de soldats du IIIème Reich) allait en fait sonner le glas d'une Wehrmacht allemande, qui en sortira anéantie, prélude à une invasion future de l'Allemagne par une Armée rouge plus que revancharde.
Historien spécialiste de la Seconde guerre mondiale (1) et ancien officier de l'armée britannique, Anthnoy Beevor retrace cet affontement atroce qui ne dura pas moins de deux ans. Pour cela, il eut accès aux archives soviétiques ouvertes en 1991 lors de l'effondrement de l'Union soviétique. Des premières victoires allemandes, en passant avec force détails par la fameuse Bataille de Stalingrad (17 juillet 1942 - 2 février 1943) - l'une des batailles les plus sanglantes de l'histoire (2) -, jusqu'à la réddition de la 6ème armée allemande, sacrifié par un Hitler incompétent en matière de stratégie militaire et peu regardant sur le sort de ses hommes, Beevor retrace à tous les niveaux (opérations militaires, quotidien des civils, relations entre les armées et le pouvoir politique..etc) cet affrontement apocalyptique, aidé en cela par des sources très variées. Il nous livre non seulement un document historique fondamental mais également une fresque passionnante et tragique à la fois. J. N
Anthony Beevor, Stalingrad, Le Livre de Poche, 2001, 600 p.
Paru pour la première fois en 1999.
(1) Il est également l'auteur d'un ouvrage référence sur la guerre d'Espagne (2006).
17:59 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : anthony beevor, stalingrad, seconde guerre mondiale, iiième riech, urss, allemagne nazie, wehrmacht
16/03/2012
Tatarstan
République autonome de la Fédération de Russie, le Tatarstan (67.847 km²/ 3.778.500 habitants/ capitale : Kazan) tenta lors de l'effondrement de l'URSS en 1991 à prendre le chemin de la souveraineté nationale, suscitant l'ire de Moscou. Un compromis a finalement été trouvé entre les autorités politiques russes et tatars, le Tatarstan détenant finalement une autonomie plus large que celle des autres entités politiques faisant partie intégrante de la Russie. Le drapeau fut adopté le 29 novembre 1991 et fut conçu par Tawil Giniat Khaziakhmatev. La couleur verte, celle de l'Islam, représentent les Tatars, peuple musulman, tandis que le rouge représente les Russes. La ligne blanche est symbole de paix entre la majorité tatare et la population russe, deuxième groupe ethnique du pays (1). J. N
(1) Le Tatarstan est composé de 53.2% de Tatars, 39.7% de Russes, et 3.1% de Tchouvaches.
23:43 Publié dans Drapeau | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : entité politique dépendante, drapeau russe, tatarstan, russie, urss, drapeau tatarstan, kazan, sujet fédéral de russie