21/01/2014
Out of the furnace
Braddock, bled paumé de Pennsylvanie. Russell Baze (Christian Bale) galère pour joindre les deux bouts, travaillant dans l'aciérie du coin. Son frère Rodney (Casey Affleck) n'en mène pas large non plus. De retour d'Irak, complètement désillusionné, il écume les petits boulots foireux pour se donner une raison de vivre. Leur père est au seuil de la mort. Le pire survient lorsque Russell se retrouve en prison pour un stupide accident de la route, qui coûte toutefois la vie à un gamin. Et lorsqu'il en sort, c'est pour découvrir que tout son monde s'est écroulé et qu'il doit sauver son frère des griffes d'un caïd local complètement taré (Woody Harrelson). Pour son deuxième long-métrage (1), Scott Cooper a décidé d'aborder la "Rust Belt", cette ceinture industrielle américaine s'étendant de Chicago à la côte Est et largement touchée par la crise économique de 2008, après un premier déclin dans les années 70 (à l'époque, on l'appelait la "Manufacturing Belt"). A travers le récit poignant de deux frères soudés jusqu'à la mort, il dépeint cette classe populaire américaine que nous connaissons mal. Nous apprécions ces films qui parlent des sans-grades et des laissez pour compte, de cette Amérique profonde qui est bien loin des fièvres new-yorkaise et californienne. Dans un style similaire, l'excellent Mud (2012) dépeignait la vie des ruraux dans le Mississipi, l'écorché de service étant campé par l'excellent Matthew McConaughey. Pas franchement éclatant, le scénario tient toutefois la route de par l'histoire sombre qu'il nous conte et essentiellement grâce à une direction d'acteurs impeccable, notamment Christian Bale, qui n'en est pas à sa première prestation brillante. J. N
Out of the furnace (Scott Cooper, USA, 2013, 116 min). Avec Christian Bale, Casey Affleck, Woody Harrelson, Willem Dafoe, Zoe Saldana, Forrest Whitaker, Sam Shepard, Tom Bower.
- 5 nominations - Festival de Rome 2013
(1) Son premier opus, Crazy Heart (2009) remporte deux oscars (Meilleur acteur, Meilleure chanson originale).
16:00 Publié dans Film | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christian bale, casey affleck, woody harrelson, forrest whitaker, zoe saldana, willem dafoe, sam shepard, tom bower
03/11/2013
Séries US : fins et nouveautés - 2
FX
La petite sœur de la célèbre FOX poursuit son immersion avec succès dans le monde des séries, en enchaînant coup sur coup plusieurs shows de qualité. Adaptation de la série suédo-danoise Bron (2011- ), The Bridge (10 juillet - 2 octobre 2013) se penche sur un meurtre sordide survenu à la frontière située entre El Paso (Texas, USA) et Ciudad de Juarez (Mexique). La juridiction des deux polices, Marco Ruiz (Juarez) et Sonia North (Diane Kruger exquise en mode Asperger) doivent traquer ensemble le serial killer opérant des deux côtés de la frontière. Lente mais prenante, la série est intéressante du fait qu'elle va bien au-delà d'une histoire de tueur en série, thème devenu très à la mode dans le rayon séries (1). Hommage au tristement célèbres disparues de Juarez, elle est surtout une réflexion sur le "mal de frontière" existant entre les USA et le Mexique et explore une situation sociale peu reluisante (drogue, prostitution, pauvreté, incompétence des autorités locales) dont souffre principalement les mexicains. A noter qu'une adaptation franco-britannique a également vu le jour (Tunnel), où le meurtre est commis dans le tunnel de la Manche. Le 24 septembre 2013, The Bridge a été renouvelée pour une seconde saison (2).
The Americans (30 janvier - 1er mai 2013) renoue avec la peur des Américains de voir proliférer sur le territoire US des agents dormants. Emboîtant le pas de Homeland (Showtime) et de ses espions islamistes, elle décortique dans une structure similaire mais dans un climat moins nerveux le métier d'agent du KGB durant la Guerre Froide, plus précisément durant la période appelée "guerre fraîche" et qui coïncide avec le mandat du président républicain Ronald Reagan (1980-1988). Elizabeth Jennings (Kerri Russell) et son époux (Matthew Rhys) sont ce couple américain on ne peut plus normal et pourtant... Le thème avait été réactualisé dernièrement dans des longs métrages plus ou moins solides (Breach, 2007 (3) ; Salt, 2010 ; The Double, 2011). Aussi complexe que Homeland mais plus subtil, ce thriller d'espionnage brille par son traitement de la double vie de personnages oscillant entre rêve américain et amour de la Mère Patrie, et par des acteurs principaux impeccables. Reste à savoir si la série puise son inspiration dans l'Affaire Rosenberg (4). Le succès de cette première saison a également entraîné, le 12 février 2013, le renouvellement pour un second acte (5).
Pour 2014, FX proposera une adaptation de Fargo (1996), le film culte des frères Coen. Au casting de cette mini-série, figureront Billy Bob Thornton, Colin Hanks (Band of Brothers, Dexter), et Kate Walsh (Grey's Anatomy) (6). Pour les Sons of Anarchy, le jeu ne se termine toujours pas pour Jax et sa bande de bikers et l'enchevêtrement de situations impossibles se poursuit. Un scénario toujours aussi égal promet une saison 6 détonante. Enclenchée le 6 septembre dernier, celle-ci prendra fin le 3 décembre lors de la diffusion du 13ème épisode (seule la saison 4 en a comporté 14).
FOX n'est pas en reste puisque la saison 2 de The Following (7) débutera le 20 janvier 2014, et que la réactivation de 24 (arrêtée en 2010 après 8 saisons) est prévue pour l'été 2014, avec une partie de l'histoire qui se déroulera à Londres (8). Toujours pour 2014, FOX a commandé une série fantastique intitulée Hieroglyph (9) et adaptera à partir du 19 janvier prochain la série anglaise éponyme Rake, centrée autour d'un avocat spécialiste des affaires criminelles dont personne ne veut se charger.
Du côté de HBO, la chaîne phare des séries brillantes (The Wire, Sopranos, Game of Thrones et consorts), point de séries dramatiques en 2013 (10). Il faudra donc attendre 2014 pour la sortie du polar True Detective, écrit par Nic Pizzolatto (The Killing), où évolueront Matthew McConaughy et Woody Harrelson dans le rôle de deux détectives traquant un serial killer depuis 17 ans. L'épisode 1 sera diffusé le 12 janvier prochain (11). Pas de date précise pour The Money (2014) - écrit par David Milch (12) -, l'histoire de la montée en puissance d'un magnat de la presse. Figurent au casting Ray Liotta, Andrea Riseborough (Oblivion, Welcome to the punch), Brendan Gleeson, et Dominique McElligott (Hell on Wheels). La comédie Looking débutera le 19 janvier.
Au rayon reprises, la saison 4 du déjà culte Game of Thrones débutera le 14 mars prochain. Ont repris True Blood (saison 6) et Boardwalk Empire (saison 4). Pour Treme (4ème et ultime saison), ce sera pour le 1er décembre, et pour la comédie Girls, début 2014. HBO prévoit également de décliner Westworld (1973). Produite par J. J Abrams et écrite par Jonathan Nolan (scénariste de quelques films de son frère, Christopher), elle sera centrée sur un parc d'attraction envahi par des androïdes (13).
Chez CBS, où décors et personnages sont toujours on ne peut plus propres (The Mentalist, The Good Wife), le survival est à nouveau de mise, après la regrettée Jericho (2007-2008) (14). Adaptation du livre éponyme de Stephen King, Under the Dome (24 juin - 16 septembre 2013 ; 13 épisodes) se situe à Chester's Hill, petite bourgade américaine où rien ne se passe, jusqu'au jour où un dôme invisible recouvre la ville et la coupe de l'extérieur, mettant à rude épreuve ses habitants. Une saison 2 est prévue pour 2014.
Le 24 février prochain, débutera Intelligence, dans laquelle Josh Holloway (le fameux Sawyer dans la série Lost) campera un agent high-tech des services de renseignement, premier du genre à avoir dans le cerveau une puce électronique le rendant redoutablement efficace. Pour les reprises, The Mentalist (saison 6) et The Good Wife (saison 5) ont enregistré un piètre niveau d'audience début octobre (15), un scénario de plus en plus redondant n'y est évidemment pas étranger. Toutefois, l'audacieux changement d'orientation opéré aux épisodes 4-5 de The Good Wife pourrait faire re-grimper l'audience.
J. N
(1) Voir la liste des séries traitant de serial killer dans le lien suivant :
http://www.imdb.com/list/f8TsiVEc3GE/?publish=save
(3) Voir le commentaire de ce film dans notre blog :
http://eklektik.hautetfort.com/archive/2008/03/14/breach.html
(4) En 1953, durant la période de Maccarthysme, Julius et Ethel Rosenberg, citoyens américains, furent accusés d'espionnage au profit de l'URSS et condamnés à mort. L'affaire eu un grand retentissement international.
(6) http://itstvnews.com/2013/10/10/kate-walsh-rejoint-le-casting-de-fargo-fx/
(7) Voir le commentaire sur cette série dans notre blog :
http://eklektik.hautetfort.com/archive/2013/03/29/the-following.html
(9) http://itstvnews.com/2013/10/18/fox-commande-une-serie-sur-legypte-antique/
(10) Sont sorties en 2013 les comédies Veep et Hello Ladies.
(12) http://itstvnews.com/2013/10/10/the-money-hbo-recrute-ray-liotta-billy-magnussen-et-mamie-gummer/
(13) http://www.mad-movies.com/Articles_Abrams_Nolan_Westworld
(14) En raison de la grève des scénaristes, la série fut stoppée durant la diffusion de la saison 2 (2008) après 7 épisodes.
14:41 Publié dans Series | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : the bridge, fox, fx, the americans, 24, fargo, the following, true detective, hbo, sons of anarchy, the money, westworld, j. j abrams, cbs, the good wife, the mentalist, under the dome, intelligence, josh holloway, stephen king, ray liotta, woody harrelson, rake, hieroglyph, guerre froide, mexique, diane kruger
13/01/2013
Seven psychopaths
Deux kidnappeurs de chiens à leurs heures, un ex-serial killer à la retraite, un mystérieux tonton flingueur, un mafieux qui n'a de yeux que pour son Shih Tzu (volé)... Au milieu de tout ça, Marty (excellent Colin Farrell), scénariste hollywoodien, alcoolique invétéré, peinant à écrire son nouveau projet, "7 psychopathes", qui bénéficie pourtant du contexte idéal... Après l'étonnant In Bruges (2008), le réalisateur irlandais Martin McDonagh poursuit dans son deuxième film son exploration du film de gangsters en poussant un peu plus le grotesque, le tout après une séquence d'ouverture anthologique, où deux tueurs, Michael Pitt et Michael Stuhlbarg (clin d'oeil à la série US Boardwalk Empire où les deux acteurs jouaient déja les truands), se font descendre. Si on peut reprocher à ce film au casting impérial un moment de rupture un peu longuet vers la fin, on retiendra au final et positivement que ce dernier ne se prend pas au sérieux, et surtout ne nous prend pas pour des cons. J. N
7 psychopaths (Martin McDonagh, UK, 2012, 110 min). Avec Colin Farrell, Sam Rockwell, Woody Harrelson, Christopher Walken, Tom Waits, Abbie Cornish, Olga Kurylenko, Helena Mattsson, Michael Pitt, Michael Stuhlbarg, Harry Dean Stanton, Zeljko Ivanek, Kevin Corrigan, Christine Marzano.
- 1 nomination (Meilleur film britannique) - BAFTA Awards 2013.
- 1 nomination (Meilleur film) - Festival de Londres 2012.
- People's Choice Award - Festival de Toronto 2012.
- Meilleur ensemble d'acteurs - Boston Society of Film Critics Awards 2012.
16:01 Publié dans Film | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : 7 psychopaths, seven psychopaths, martin mcdonagh, colin farrell, sam rockwell, woody harrelson, christopher walken, tom waits, abbie cornish, olga kurylenko, helena mattsson, michael pitt, michael stuhlbarg, harry dean stanton, zeljko ivanek, kevin corrigan, christine marzano, in bruges
16/09/2006
A scanner darkly
A propos de Philip K. Dick
"A scanner darkly" est le 5ème long-métrage hollywoodien adapté de l'oeuvre de Philip K. Dick. Publié pour la première fois en 1952, celui-ci s'oriente rapidement, après des débuts classiques, vers une science-fiction plus personnelle, où se déploient un questionnement permanent de la réalité et une réflexion radicale sur la folie. On peut considérer que A scanner darkly (en français : "Substance M", disponible aux éditions Folio) est l'oeuvre la plus personnelle de Philip K. Dick. Explorateur inlassable de mondes schizophrènes, désorganisés et équivoques, il clame tout au long de ses oeuvres que la réalité n'est qu'une illusion, figée par une perception humaine imparfaite.
Philip K. Dick (1928-1982) eut une existence instable, faite de divorces multiples, de drogues, de tentatives de suicide ou de recherches mystiques. La rapidité avec laquelle sont écrites certaines de ses oeuvres (notamment Minority Report) s'explique par des consommations très fréquentes de LSD et d'amphétamines.
Avant A scanner darkly, le cultissime Blade Runner (inspiré de son roman Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques?) fut réalisé par Ridley Scott (1982, avec Harrison Ford et Sean Young). Suivit Total Recall, inspiré de sa longue nouvelle "Souvenirs à vendre" et réalisé par Paul Verhoeven (1990, avec Arnold Schwarzenegger) puis Minority Report (adapté du roman homonyme), réalisé par Steven Spielberg (2002, avec Tom Cruise et Collin Farell) et le très moyen Paycheck (2003, avec Ben Affleck, Uma Thurman et Aaron Eckart), normal c'est réalisé par John Woo.
Le premier a avoir tenté de réaliser A scanner darkly fut le "réalisateur à risques" Terry Gilliam (Brazil, The fisher king, 12 monkeys, Fear and loathing in Las Vegas). Ensuite, Georges Clooney et Steven Soderbergh se sont emparés de l'affaire, ils sont tous les deux producteurs exécutifs dans ce long-métrage, réalisé par Richard Linklater.
Lorsqu'il décède à l'âge de 54 ans, P. K. Dick est peu connu du public. Toute sa vie durant, il fut relativement pauvre, parfois même miséreux (dans un de ses articles, il décrit avec humour l'époque où sa femme et lui étaient contraints de se nourrir avec des boîtes de chien) alors que d'autres écrivains américains de science-fiction, comme Isaac Asimov (auteur culte du cycle Fondation), Robert A. Heinlein et Franck Herbert (Dune). (Cf. la préface de Julie Péjos dans Minority Report, éditions Folio, 2002) vivaient un grand succès.
Aujourd'hui, il est considéré comme un génie de la science-fiction même s'il ne possède pas le style le plus affiné (il écrivait trop vite). Inventions multiples, décalages vertigineux et hallucinants dans la perception du futur constituent sa marque de fabrique. On considère que sa façon de percevoir le futur était différente de celle d'autres écrivains ayant plus de succès que lui. Sa façon de percevoir le futur était différente. Au lieu de construire ses histoires sur des concepts (comme les autres), il le faisait autour de personnages. Ceux-ci n'étaient pas des héros mais des citoyens ordinaires du futur confrontés à toutes sortes de soucis quotidiens (argent, relations, emploi...). Comme tout le monde.
Dick fut sans doute inspiré dans ses oeuvres par sa vie même : soucis financiers, 5 fois marié, grosse consommation de drogues... Normal que certaines de ses oeuvres soient assez glauques (Substance M) : beaucoup de LSD. En 1982, il vu une avant-première de Blade Runner mais décéda avant la sortie de ce dernier. Dommage qu'il soit décédé avant la sortie des autres films adaptés de son oeuvre. Celle-ci demeure immense aujourd'hui et il est désormais considéré comme un éminent auteur de science-fiction.
Dans A scanner Darkly de Richard Linklater, l'univers de Philip K. Dick est revisité par l'animation : aux prises de vue des acteurs sont superposées des créations infographique très sophistiquées (comme dans Waking Life, 2001, du même réalisateur) : la performance des comédiens est recréée par les procédés de l'animation. Robert Downey Jr. est énorme. A travers ce monde déglingué où se conjuguent paranoïa, schizophrénie, hallucinations et démence, confusion entre le réel et l'irréel, on peut entrevoir une certaine critique de l'Amérique d'aujourd'hui marquée par la psychose qui résulte du 11 septembre 2001 (même si l'oeuvre est antérieure), sans que le film soit tout à fait politiquement engagé. Tout le monde est suspect et chacun est coupable jusqu'à preuve du contaire.
A SCANNER DARKLY (Richard Linklater, USA, 2006, 100 mins). Avec Keanu Reeves, Winona Ryder, Robert Downey Jr., Woody Harrelson, Rory Cochrane.
02:55 Publié dans Film, Livre | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : science-fiction, philip k. dick, a scanner darkly, steven soderbergh, blade runner, keanu reeves, winona ryder, robert downey jr., rory cochrane, woody harrelson