19/12/2020
Totally Under Control
Toujours Alex Gibney. Le documentariste des mauvais agissements et des actes illicites a eu l'idée de s'attaquer à la gestion américaine de la pandémie du Covid-19 après qu'un ami ait succombé à sa contamination au virus dévastateur. Vu que son temps était compté (désirant terminer le documentaire avant l'élection présidentielle américaine de l'automne 2020), il a été cette fois-ci secondé par deux autres réalisateurs.
Gibney nous plonge ainsi dans les premiers mois de la propagation du coronavirus aux Etats-Unis, soit à partir du 20 janvier 2020 (premier cas de contamination à Seattle). Ce regard en profondeur sur la réponse de l'administration Trump face à la pandémie en cours est édifiant et confirme encore une fois toute l'incompétence et l'incurie d'un gouvernement que nous sommes bien heureux (et nous ne sommes pas les seuls) de voir quitter le pouvoir. L'argumentation est jalonnée d'une comparaison avec la gestion du virus en Corée du Sud, où les choses se sont passées beaucoup mieux. Petit bémol et nous avions relevé ceci dans un commentaire précédent sur un documentaire de Gibney (Citizen K, 2019) : le raisonnement n'est pas toujours pertinent, soit la comparaison ici avec la gestion de pandémies par l'adminitration Obama (H1N1, Ebola notamment) alors que celles-ci n'avaient pas la même amplitude. Quoi qu'il en soit, l'argument principal est sidérant : la gestion calamiteuse d'un gouvernement qui a minimisé l'impact du virus mondial au nom d'impératifs économiques qu'il n'a pas pu tenir non plus. Pensant remporter la présidentielle grâce aux statistiques économiques, Trump l'a finalement perdue en raison d'une situation sanitaire et économique catastrophique aux Etats-Unis.
Autre constat : il n'y a pas de secret en politique. Le manque d'expérience conjugué à de l'arrogance extrême, de la condescendance et une allergie inouie à la critique ne paient pas. Trois dirigeants élus il y a quelques années à la fonction suprême et se disant "anti-système" ont échoué. Minimisant l'impact du virus, les dirigeants racistes que sont Jair Bolsonaro (Brésil) et Donald Trump ont plongé leur pays dans le chaos et contracté le virus au passage (Trump au moment de la finalisation de ce documentaire...). En France, où la gestion du virus laisse également à désirer, Emmanuel Macron vient de contracter le virus mais cela ne l'a pas empêché de célébrer son anniversaire à l'Elysée avec de nombreuses personnes tandis que dans le même temps, des restrictions (couvre-feu, pas moins de 6 personnes à dîner...etc) sont imposées aux Français. Il y a un moment déjà que nous avons compris que les politiques se fichent de montrer l'exemple. Des politiques qui méritent l'échaffaud. J. N
Totally Under Control (Alex Gibney, Ophelia Harutyunyan, Suzanne Hillinger, USA, 2020, 123 min)
09:57 Publié dans Documentaire, Film | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : alex gibney, totally under control, donald trump, covid-19, coronavirus, administration trump, etats-unis, pandémie, corée du sud, neon, france, emmanuel macron, macron, jair bolsonaro, brésil
25/04/2020
The Cave
Il est sans aucun doute très noble - à l'heure du Covid-19 - de mettre en avant le travail très ingrat des soignants et de porter un hommage à ces personnes se trouvant en première ligne d'une très possible contamination. Mais il est également des places dans le monde où les soignant(e)s travaillent dans des conditions encore plus dures et auxquelles peu de gens s'intéressent (ou ne veulent s'intéresser) car c'est bien connu, pour le monde occidental, certains humains (ou morts) valent plus que d'autres... C'est à ces soignantes que s'est intéressé le réalisateur syrien Firas Fayyad en suivant plus particulièrement le docteur (et militante féministe) Amani Ballour qui dirige un hôpital de fortune dans les souterrains (d'où le titre du documentaire) de la partie est de la région de Ghouta, dans les faubourgs de Damas. C'est rappeler ici que la Ghouta, tenue alors par l'armée libre syrienne, avait subi le 21 août 2013 un bombardement chimique au gaz sarin de la part du gouvernement du syrien, et que s'est tenu de 2012 à 2018 la tristement célèbre Bataille de la Ghouta orientale (victoire des forces loyalistes ; 15.000 à 20.000 civils tués).
Déjà acclamé par la critique pour son précédent documentaire (Les derniers hommes d'Alep, 2017), Firas Fayyad a voulu montrer à travers son documentaire la guerre mais surtout ce que vivent les civils. "Le film devrait mettre les gens dans une position inconfortable pour regarder la terrible réalité qui nous entoure", a-t-il déclaré lors d'une interview. Rendons ici hommage à ces femmes qui risquent leur vie tous les jours mais qui plus est subissent sexisme et harcèlement de la part de l'entourage masculin tout azimut, dans une société arriérée.
A l'instar de Florent Marcie qui a filmé sous les bombes à Grozny, Fayyad et son équipe ont tourné à Ghouta sous une pluie régulière de bombes et alors que les victimes sont emmenées aux soins. Rien que pour cette prouesse mais aussi du fait que Fayyad risque continuellement sa vie (il a été torturé par les autorités syriennes pour ses précédents documentaires sur la Syrie), le documentaire aurait du recevoir l'oscar 2020 du meilleur documentaire. Mais force est de constater que cette récompense est (trop) souvent attribuée à un documentaire américain. En effet, sur les vingt dernières années (2001-2020), elle n'a échappé que trois fois aux Etats-Unis... J N
The Cave (Firas Fayyad, Syrie/Danemark, 2019, 107 min)
- 1 nomination (meilleur documentaire) - Oscars 2020
- Présenté - Festival international de Toronto 2019
- Meilleur documentaire - Danish Film Awards 2020
- Meilleur documentaire - Festival international de Cork 2019
- Meilleur documentaire - Festival international de Leeds 2019
- Meilleur documentaire - Festival international de Valladolid 2019
- Documentaire le plus dérangeant - Ramdam festival de Tournai 2020
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09:00 Publié dans Documentaire, Film | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : the cave, ghouta, syrie, firas fayyad, danemark, oscars 2020, gaz sarin, damas, amani ballour, coronavirus, covid-19
24/04/2020
Indice de liberté de presse - 2020
La pandémie actuelle du Coronavirus/Covid-19 est du pain béni pour de nombreux gouvernements. Dans certains cas, elle permet de masquer la crise économique aiguë traversée en ce moment (Liban) mais plus généralement, elle fournit un prétexte à de nombreux gouvernements pour restreindre encore plus les libertés individuelles, notamment la liberté de la presse.
C'est ce qu'affirme l'ONG Reporters sans Frontières qui a publié le 21 avril 2020 son classement annuel de la liberté de la presse. C'est le cas par exemple de la Chine (177e) et de l'Iran (173e) - les deux premiers foyers de l'épidémie - qui ont mis en place des dispositifs de censure massifs. En Irak (162e), la licence de l'agence de presse Reuters a été suspendue car cette dernière a remis en cause via une dépêche les chiffres officiels concernant le coronavirus. Au Turkménistan (179e), l'un des pays les plus autoritaires et fermés au monde et où il y a officiellement zéro cas de coronavirus, l'emploi du mot "coronavirus" est passible d'une peine de prison. Considéré comme l'Etat le plus autoritaire au monde (et où il n'y a également - officiellement - aucun cas de contamination), la Corée du Nord occupe la dernière place du classement.
Si l'Occident se classe généralement bien (8 Etats dans le TOP 10, 16 dans le TOP 20) et que les pays nordiques occupent encore une fois le TOP 4 (voir classement ci-dessous), il n'échappe pas pour autant à cette tendance mondiale de musellement des médias. En pleine dérive autoritaire depuis des années, la Hongrie (89e, -2 places) de Viktor Orban a fait passer une "loi coronavirus" sanctionnant jusqu'à 5 ans de prison ferme la "diffusion de fausses informations" concernant le virus.
Progressions et régressions
Pour la 4ème année consécutive, la Norvège - exemple de démocratie - demeure 1ère du classement. Mais la meilleure progression est à créditer à la Malaise (101e) et aux Maldives (179e), après une alternance politique (en Malaisie, le premier ministre Najib Razak a quitté le pouvoir en 2018) qui leur fait respectivement gagner 22 et 19 places. Le Soudan (où l'ancien dictateur Omar el-Bashir a été écarté l'an passé) gagne de même 16 places. Les pires reculs sont du côté des pays en développement : Haïti (83e) et les Iles Comores (75e) perdent respectivement 21 et 19 places.
C'est la région Asie-Pacifique qui marque le recul le plus important (+1.7%). Généralement modèle de démocratie, l'Australie perd 5 places (26e) tandis que Singapour (158e) - Etat autoritaire - en perd 7. La région Moyen-Orient/Afrique du Nord demeure par ailleurs le coin le plus dangereux pour le journalisme, où l'Arabie Saoudite (170e, +2) et l'Egypte (166e, -3) sont - au niveau mondial - les pays où il y a le plus de journalistes emprisonnés.
Si l'Europe et l'Amérique sont généralement les bons élèves de ce classement, cela n'empêche pas des reculs notoires dans certains Etats. La première puissance mondiale - les USA - n'est "que" 45ème (+3) tandis que la première puissance d'Amérique du Sud - le Brésil - est 107ème (-2). Dans ces deux cas, les présidents (respectivement Trump et Bolsonaro) participent activement de cette état de la liberté de la presse, de par leur attitude anti-démocratique et anti-médias, incitant même publiquement à une haine contre les médias.
Même l'Europe occidentale n'échappe pas à une certaine régression. La France, où les journalistes sont victimes d'agressions policières (crise des gilets jaunes) n'est "que" 34ème (-2). Le Royaume-Uni ne fait pas mieux (35e, -2) tandis que des démocraties authentiques comme la Belgique (12e, -3) et la Suisse (8e, -2) régressent également.
Dans le monde arabe, c'est la Tunisie (une transition démocratique plutôt réussie lors du Printemps arabe) qui se classe le mieux (72e, 0) tandis que le Liban (107e, -1) est le pays arabe du Moyen-Orient qui fait le mieux (107e, -1), suivi du Koweït (109e, -1). Les 20 derniers pays du classement sont fort logiquement des pays du sud et autoritaires. Certains sont également instables sur le plan politique. Il convient de même de souligner la corrélation entre crise économique et répression (ou absence de confiance envers) des médias. En effet, tous les Etats marqués par une crise socio-économique durant la période 2019-2020 (Liban, Irak, Iran, Bolivie, Chili, Haïti, Equateur..etc) régressent. En tout état de cause, cette reculade de la liberté de la presse un peu partout semble devenir une normalité. Et c'est une très mauvaise nouvelle. J. N
TOP 20
1. Norvège
2. Finlande
3. Danemark
4. Suède
5. Pays-Bas
6. Jamaïque
7. Costa Rica
8. Suisse
9. Nouvelle-Zélande
10. Portugal
11. Allemagne
12. Belgique
13. Irlande
14. Estonie
15. Islande
16. Canada
17. Luxembourg
18. Autriche
19. Uruguay
20. Suriname
Les 20 Etats les moins bien classés
161. Tadjikistan
162. Irak
163. Somalie
164. Libye
165. Guinée Equatoriale
166. Egypte
167. Yémen
168. Azerbaïdjan
169. Bahreïn
170. Arabie Saoudite
171. Cuba
172. Laos
173. Iran
174. Syrie
175. Vietnam
176. Djibouti
177. Chine
178. Érythrée
179. Turkménistan
180. Corée du Nord
Classement complet
15:11 Publié dans Liste/Classement | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : norvège, finlande, danemark, erythrée, corée du nord, turkménistan, chine, donald trump, trump, bolsonaro, bolivie, chili, soudan, singapour, maldives, reporters sans frontières, coronavirus, covid-19, indice de liberté de presse, indice de liberté de presse 2020, journalisme, irak, iran, liban, tunisie, tadjikistan, haïti, france, etats-unis, brésil, malaisie, iles comores, cuba, vietnam, yémen, djibouti, syrie, laos, portugal, pays-bas, jamaïque, costa rica, nouvelle-zélande, koweït, suède, suisse, equateur, rsf