18/03/2012
Festival du Film turc à Beyrouth
Du 5 au 11 mars, s'est tenu à Beyrouth (Liban) le deuxième festival de films turcs (après celui de 2011). Nous avons eu le privilège d'en voir quelques uns. Fort logiquement, était diffusé en avant-première (puis une seconde fois), le bijou de Nuri Bilge Ceylan, Il était une fois en Anatolie (Bir zamanlar Anadolu'da, 2011), que l'on recommande vivement. Densité narrative hallucinante, personnages complexes et fouillés, mise en scène somptueuse pour un long de 02h30... Le réalisateur d'Uzak (2004) (1) et de Trois singes (2008) (2) a été récompensé du Grand prix du Jury (et fut également en compétition pour la Palme d'or) au dernier Festival de Cannes.
Nous avons beaucoup apprécié de même Shadows and faces (Gölgeler ve suretler, 2010) de Dervis Zaim, dont l'acteur principal (Osman Alkas) était présent pour un débat autour du film. L'histoire tourne autour des prémisses du conflit chypriote (l'île est toujours divisée en deux souverainetés, chypre et turque, et le conflit n'est toujours pas résolu). Sans parti pris et plutôt que de retracer les jalonenments politiques qui menèrent à la partition de l'île, le réalisateur s'est focalisé sur le quotidien des civils. Alors que les habitants vivent dans une harmonie relative (les villages sont mixtes), il suffit que les politiques et militaires les manipulent pour que les premiers soubresauts d'une guerre civile apparaissent. Zaim a brillament montré qu'il suffise que quelques abrutis, sans trop réfléchir, soient épris d'une soudaine animosité pour leurs voisins, pour que la violence se propage, prélude à un engrenage irréversible (3). Un film précieux.
Majority (Çoğunluk) de Seren Yüce est aussi une belle surprise. Primé à la Mostra de Venise en 2010 (Prix Luigi de Laurentiis pour le réalisateur) et lauréat de nombreux prix (Festivals d'Ankara d'Antalya et d'Angers), ce film retrace le quotidien de Mertkan, jeune homme oisif, fils d'un grand entrepreneur. Rencontrant une charmante kurde, Mertkan a l'occasion de sortir du schéma classique turc. Mais le père, nationaliste et islamisant, est intransigeant car "ces gens veulent diviser notre pays et nous sommes tous turcs et musulmans". Mertkan est invité à rentrer dans le rang et rejoindre la "majorité". Pour ceux qui ne connaissent pas, un portrait de cette couche sociale turque, libérale sur le plan économique, conservatrice au niveau des moeurs, et nationaliste (constituant donc le vote AKP).
Un peu trop lent et contemplatif, Hair de Tayfun Pirselimoğlu (Şaç, 2010), se concentre pour sa part sur les Turcs qui galèrent, soit la basse-moyenne classe et le quotidien miséreux d'un vendeur de perruques, bizarrement attirée par une femme au quotidien de vie encore plus insipide. Tourné en huis clos et à la frontière entre le réel et le surnaturel, l'étonnant Pomegranate (Nar, Umit Unal, 2011) est une confrontation entre la modernité et la tradition, sujets qui travaillent constamment la société turque. Quant à Zephyr (Belma Bas, 2010), c'est une belle ode à l'enfance et à la nature.
Le festival comprenait par ailleurs un mini-cycle Fatih Akin (le réalisateur turco-allemand qu'on ne présente plus) avec 3 films et un documentaire (4). Onze films au total pour un excellent aperçu sur le cinéma turc indépendant et la société turque.
Jihad Naoufal
(1) Prix du meilleur film étranger de l'année au Festival de Cannes 2004 ainsi qu'une rimbambelle d'autres récompenses.
(2) Grand Prix au Festival de Cannes 2008.
(3) Sur le thème de la guerre en Bosnie, Cirkus Columbia de Dannis Tanovis présente la même structure. Cf. la note sur ce film :
http://eklektik.hautetfort.com/archive/2010/10/10/cirkus-columbia.html
(4) In july (2000), Solino (2002), Head-On (2004), Crossing the bridge (2005).
13:22 Publié dans Film | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : beyrouth, films turcs, festival du film turc à beyrouth, fatih akin, nuri bilge ceylan, liban, shadows and faces, pomegranate, zephyr, majority, once upon a time in anatolia, hair, belma bas, umit unal, cirkus columbia, dannis tanovic
17/03/2012
Le cauchemar de Darwin
"Les rives du grand lac tropical du monde, considéré comme le berceau de l'humanité, sont aujourd'hui le théâtre du pire cauchemar de la mondialisation." Dans les années 60, suite à une expérience scientifique, la Perche du Nil, un poisson prédateur, fut introduite dans les eaux du lac Victoria. Nous sommes en Tanzanie. L'extinction de toutes les espèces de poissons vivantes dans le lac est non seulement la cause d'une catastrophe écologique et d'une misère sociale (exit les petits pêcheurs) mais plus grave encore, elle s'accompagne d'un marché ô combien fructueux. En effet, exportés en occident, les filets de perche rapportent gros aux quelques riches tandis que (encore pire) les carcasses sont laissés aux habitants locaux. Cette nourriture rapidement avariée (car séchée au soleil) entraîne des maladies. Dans le même temps, les femmes se prostituent pour survivre, en se vendant pour une bouchée de pain aux entrepreneurs étrangers et le sida se propage... Construit comme un système de cause à effets constituant un cercle vicieux indémantelable, ce documentaire poignant, acclamé par la critique en 2005, est une reflexion brillante sur les dilemmes de la mondialisation économique. J N
Le cauchemar de Darwin (Hubert Sauper, Fr/Bel/Aut, 2004, 107 mins)
- Meilleur premier film (Hubert Sauper) - Césars 2006.
- 1 nomination (meilleur documentaire) - Oscars 2006.
- Meilleur documentaire - European Film Awards 2004.
- Prix Label Europa Cinemas (Hubert Sauper) - Festival de Venise 2004.
- Présenté - Festival de Toronto 2004.
- Meilleur documentaire - National Society of Film Critics 2005.
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00:24 Publié dans Documentaire, Film | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le cauchemar de darwin, tanzanie, perche du nil, hubert sauper, lac victoria, mondialisation, afrique
16/03/2012
A dangerous method
Souffrant d'hystérie, Sabina Spielrein (Kiera Knightley) est soignée par le psychanaliste Carl Jung (Michael Fassbender) dont elle devient la maîtresse. Lorsqu'elle entre en contact avec un autre fameux psychanaliste, Sigmund Freud (Viggo Mortensen), leur relation se complique et entraîne également une brouille entre les deux pionniers de la psychanalise, prélude à une rupture définitive. Avec A History of violence (2005) et Eastern promises (2007), on pensait le très spécial réalisateur canadien - qu'on ne présente plus - parti sur un nouveau cycle axé sur le thème de la propagation insidieuse de la violence (après phase de sexualité "sombre"). Il n'en est rien en fait, A dangerous method est en rupture avec les deux précédents opus. Mais le point de départ est stable. Tout chez Cronenberg est intimement lié au corps humain et son corrolaire, le contact physique. D'une lenteur rare chez Cronenberg, intellectualisé à souhait et densément narratif, ce dernier opus ne déroge pas à la rêve, catégorie mise en scène lêchée. David Cronenberg a surtout réussi la prouesse de condenser brillament en une heure quarante l'enjeu - la psychanalise - de tout un siècle.
A dangerous method (David Cronenberg, USA, 2011, 110 mins). Avec Michael Fassbender, Viggo Mortensen, Kiera Knightley, Vincent Cassel.
- 1 nomination - Golden Globe 2012.
- En compétition (Lion d'or) - Festival de Venise 2011.
- Meilleur acteur (Michael Fassbender) - London Critics Film Awards 2012.
- Meilleur acteur (Michael Fassbender) - National Board of Review 2011.
- 1 nomination - Satellite Awards 2011.
- Présenté - Festival de Londres 2011.
- Présenté - Festival de Toronto 2011.
23:09 Publié dans Film | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : a dangerous method, david cronenberg, sigmund freud, viggo mortensen, michael fassbender, kiera knightley, vincent cassel
27/02/2012
Oscars 2012
The Artist sur un nuage
Après les Golden Globe et les Césars, The Artist poursuit sa razzia en remportant pas moins de quatre oscars dont les deux plus prestigieux (meilleur film, meilleur réalisateur). Meilleur acteur aux Golden Globe (l'anti-chambre des oscars) mais pas aux Césars, Jean Dujardin poursuit son rêve et rafle la mise au nez et à la barbe de superstars tel George Clooney et Brad Pitt. Le bijou de Michel Hazanavicius remporte également les statuettes consacrant la meilleur musique et les meilleurs costumes. Hugo de Martin Scorsese repart quand à lui avec 5 oscars dont 3 "techniques". Enfin, Meryl Streep qu'on ne présente plus, remporte pour la deuxième fois de sa carrière l'oscar de la meilleure actrice pour son interprétation de Margaret Thatcher dans The Iron Lady de Phyllida Lloyd.
Palmarès de la 84ème cérémonie des Oscars, tenue le dimanche 27 février 2012 à Hollywood :
Meilleur film : The Artist (Michel Hazanavicius).
Meilleur réalisateur : Michel Hazanavicius (The Artist).
Meilleur acteur : Jean Dujardin (The Artist).
Meilleur acteur dans un second rôle : Christopher Plummer (Beginners).
Meilleure actrice : Meryl Streep (The Iron Lady).
Meilleure actrice dans un second rôle : Octavia Spencer (The Help).
Meilleur scénario original : Woody Allen (Midnight in Paris).
Meilleure photographie : Robert Richardson (Hugo).
Meilleur scénario adapté : Alexander Payne et Nat Faxon & Jim Rash (The Descendants).
Meilleure montage : Kirk Baxter et Angus Wall (Millenium).
Meilleur montage sonore : Philip Stockton et Eugene Gearty (Hugo).
Meilleur mixage de son : Tom Fleischman et John Midgley (Hugo).
Meilleur film étranger : Une séparation (Ashgar Farhadi).
Meilleurs effets visuels : Rob Legato, Joss Williams, Ben Grossman et Alex Henning (Hugo).
Meilleure musique originale : Ludovic Bourse (The Artist).
Meilleurs direction artistique : Dante Ferretti et Francesca Lo Schiavo (Hugo).
Meilleur documentaire : Undefeated (Daniel Lindsay et T. J. Martin).
Meilleur film d'animation : Rango (Gore Verbinski).
Meilleurs costumes : Mark Bridges (The Artist).
Meilleurs maquillages : Mark Coulier et J. Roy Helland (The Iron Lady).
13:26 Publié dans Film | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : oscars, oscars 2012, the artist, jean dujardin, michel hazanavicius, meryl streep, christopher plummer, hugo, woody allen, martin scorsese, ashgar farhadi, une séparation, golden globe
16/01/2012
Golden Globes 2012
Palmarès de la 69ème cérémonie des Golden Globe Awards 2012, tenue le dimanche 15 janvier 2012 :
Meilleur film dramatique : The Descendants (Alexander Payne).
Meilleur réalisateur : Martin Scorsese (Hugo).
Meilleure actrice dans un film dramatique : Meryl Streep (The Iron Lady).
Meilleur acteur dans un film dramatique : George Clooney (The Descendants).
Meilleur film comique ou musical : The Artist (Michel Hazanavicius).
Meilleure actrice - comédie/musical : Michelle Williams (My week with Marilyn).
Meilleur acteur - comédie/musical : Jean Dujardin (The Artist).
Meilleure actrice dans un second rôle : Octavia Spencer (The Help).
Meilleur acteur dans un second rôle : Christopher Plummer (Beginners).
Meilleur scénario : Woody Allen (Midnight in Paris).
Meilleur film etranger : Une séparation (Asghar Farhadi).
Meilleure musique : Ludovic Bourse (The Artist).
Meilleure mini-série ou meilleur mini-film : Downtown Abbey.
Meilleure série télévisée dramatique : Homeland.
Meilleure actrice dans une sérié télévisée dramatique : Claire Danes (Homeland).
Meilleur acteur dans une série télévisée dramatique : Kelsey Grammer (Boss).
Meilleure actrice dans une mini-série : Kate Winslet (Mildred Pierce).
Meilleur acteur dans une mini-série : Idriss Elba (Luther).
Meilleur acteur dans un second rôle (série, mini-série ou TV) : Peter Dinklage (Game of Thrones).
Meilleure actrice dans un second rôle (série, mini-série ou TV) : Jessica Lange (American Horror Story).
10:45 Publié dans Film, Series | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : golden globe awards, golden globes 2012, jean dujardin, the artist, george clooney, golden globe 2012, michel hazanavicius, meryl streep, martin scorsese, alexander payne, hugo, the descendants, idriss elba, christopher plummer, homeland, claire danes, boss, kelsey grammer, peter dinklage, game of thrones, luther, kate winslet, asghar farhadi