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17/12/2020

The Perfect Weapon

john maggio,the perfect weapon,hbo,hbo max,cyberguerre,cybercriminalité,russie,corée du nord,gru,etats-unis,natanz,iran,souveraineté des etatsVu le début du documentaire, nous pensions que celui-ci traitait du même sujet que Zero Days (2016). Les premières images et paroles concernaient en effet l'affaire du virus Stuxnet qui détruisit en 2009 une partie du complexe nucléaire de Natanz en Iran, complot dans lequel étaient hautement impliqués les Etats-Unis et cette affaire était décryptée dans l'autre documentaire, réalisé par le prolifique Alex Gibney. Mais nous constations assez rapidement que c'est en fait une suite/conséquence de Zero Days. L'affaire Natanz n'était pas sans conséquences pour les Etats-Unis puisque l'Iran répliquait en infectant le système électronique d'un géant du casino à Las Vegas. 2ème cas abordé : la Corée du Nord s'attaquant au système électronique de firme Sony en raison d'un film américain en production et dans lequel Kim Jong-un devait être assassiné par un commando américain. 3ème cas, le GRU (les services de renseignements de l'armée russe s'attaquaient au quartier général du Comité national démocrate (à Washington), l'organisme américain chargé de diriger le Parti démocrate au niveau national.

La Russie n'était pas en reste puisqu'elle interférait par la suite dans la campagne présidentielle américaine de 2016, en inondant les réseaux sociaux de désinformation ternissant l'image de la candidate démocrate Hillary Clinton. Finalement, comme Zero Days, même s'il se concentre sur la première puissance mondiale, ce documentaire - basé sur l'ouvrage éponyme de David E. Sanger et diffusé le 16 octobre dernier sur HBO - a le mérite de mettre en exergue un phénomène récent : la place de plus en plus importante de la cyberguerre (la guerre "silencieuse") dans les guerres intertétatiques. De même, l'abord du cas de la présidentielle américaine et de la désinformation (abordés également dans les documentaires The Great Hack et The Social Dilemma) soulève une nouvelle question géopolitique fondamentale : l'impact de la cyberguerre sur la souveraineté des Etats. J. N et C. A

The Perfect Weapon (John Maggio, USA, 2020, 97 min)

15/12/2020

Les mondes de Philip K. Dick

MV5BYzk2ZTc3MDQtZGU4Yi00ZWZkLTgwMTAtYmExM2M2MWZjNGFhXkEyXkFqcGdeQXVyNTM3MDMyMDQ@._V1_UY268_CR9,0,182,268_AL_.jpgFait assez rare pour être cité, nous avons offert la semaine passée deux livres de Philip K. Dick (deux recueils de nouvelles, FOLIO SF) de notre collection sacrée à deux de nos élèves en Première HGGSP. J'avais eu l'agréable surprise de les entendre discuter à la pause du thème de la dystopie, terme que ne connait pas la quasi-majorité des ados de cette âge-lâ (génération d'écervelés par ailleurs). L'occasion de revenir sur ce documentaire consacré à Dick par ARTE en 2015.

On apprend ici sur la vie de Philip K. Dick, la psychose qui travaillait son œuvre, l'essence de celle-ci et l'apport inestimable qu'elle apporta au genre de la science-fiction, et son obsession avec l'intelligence artificielle. Nous ne revenons pas longuement sur son œuvre, l'ayant déjà effectué dans nos nombreux commentaires sur ses romans, notamment notre première note dont le point de départ était Substance mort.

Le documentaire est traversé par le témoignage de la seconde femme de Dick, Tessa, par des commentaires d'auteurs de SF comme David Brin qui affirme qu'"il n'écrivait pas des romans basés sur l'horreur mais plutôt sur la sinistre sensation que toutes nos certitudes sont bâties sur du sable", mais également par des citations (accompagnées d'extraits vidéos) des œuvres de Dick, notamment Blade Runner, Minority Report, Ubik, Le dieu venu du centaure, Le bal des schizos, Simulacres...etc.

Sans doute, c'est un peu court (55 min) mais cela demeure un très bon condensé de la vie et de l'œuvre de celui "dont l'œuvre a anticipé comme aucune autre le monde paranoïaque et technologique de notre XXIème siècle". Pour comprendre avec plus d'acuité la vie et toute la dimension du chef-d'oeuvre dickien, il faudra lire les biographies qui lui sont dédiées en anglais, ou celle, excellente et en français, d'Emmanuel Carrère, Je suis vivant et vous êtes mortsJ. N

Les mondes de Philip K. Dick (2016, 55 min)

Scénaristes : Yann Coquart, Ariel Kyrou

Production : ARTE Production, Nova Production

14/12/2020

Miss Hokusai

hokusai,miss hokusai,keiichi haraIl fallait bien mettre un petit commentaire pour notre 200ème long-métrage de l'année. C'est avec retard que nous avons découvert celui-ci puisque sa diffusion publique remonte à 2015. Il s'agit donc du regard porté sur le maître japonais Katsushika Hokusai (1760-1849), spécialiste de l'ukiyo-e (1) par sa fille O-Ei

Au caractère bien trempé, elle vit dans l'ombre du père tout en contribuant à la légende de celui-ci, en dessinant avec lui dans leur atelier aux allures de dépotoir. Un récit simple, humain et touchant, où la sublime nature japonaise se mêle avec délicatesse aux manifestations surnaturelles un peu plus fougueuses. Ce voyage contemplatif et onirique d'une grande beauté visuelle nous promène dans les oeuvres du maître (à l'instar du magnifique Loving Vincent (2017) qui rendait hommage à Van Gogh) tout en rendant justice et hommage à cette grande dessinatrice, et en nous faisant découvrir la vie de tous les jours dans un village japonais du début du XIXème siècle. Magnifique tout simplement. R. H et J. N 

(1) Signifiant "image du monde flottant", c'est un mouvement artistique japonais de l'époque d'Edo (le nom de Tokyo entre 1603 et 1868) comprenant une peinture populaire et narrative originale mais surtout les estampes japonaises gravées sur bois. 

 

Miss Hokusai (Keiichi Hara, Japon, 93 min) 

- Meilleur film d'animation - Asia Pacific Screen Awards 2015

- Meilleur film d'animation - Fantasia Film Festival 2015

- 1 nomination (meilleur film d'animation) - Awards of the Japanese Academy 2016

- 1 nomination (meilleur film) - Festival d'animation d'Annecy 2015

- 1 nomination (meilleur film d'animation) - Annie Awards 2017

12/12/2020

Mank

david fincher,mank,hollywood,gary oldman,amanda seyfried,lilly collinsCa fait un bail qu'on attendait un opus d'un de nos réalisateurs US fétiches, lui qui n'avait plus dirigé de long-métrage depuis Gone Girl (2014). L'attente ne fut pas déçue avec ce film miroir d'un grand classique du cinéma, Citizen Kane (1941). Plongé dans un alcoolisme irrémédiable, le scénariste Herman J. Mankiewicz tente, tant bien que mal, de boucler le script du film culte d'Orson Welles, devant également composer avec le caractère peu conciliant de ce dernier et la surveillance du cerbère de service, le producteur John Houseman.

On pensait donc à un film sur les coulisses d'un film, comme ce fut le cas avec Hitchcock (2012) mais les nombreux flashbacks reviennent d'une part sur l'évolution d'Hollywood durant la Grande Dépression et d'autre part sur les relations qu'entretient Mankiewicz avec le producteur Louis B. Meyer, le magnat de la presse William Randoph Hearst (qui a inspiré le personnage principal de Citizen Kane) et sa maîtresse Marion Davies (Amanda Seyfried) avec qui il se lie d'amitié, le tout permettant de comprendre la véritable génèse de Citizen Kane et l'état d'esprit de son scénariste longtemps occulté.

gary oldman,lily collins,david fincher,mank,hollywood,amanda seyfried,tuppence middleton,tom burke,tom pelphrey,charles dance,toby leonard moore,citizen kane,herman j. mankiewicz,orson wellesA ces différentes dimensions, il y a bien entendu le regard critique et sarcastique porté sur l'industrie hollywoodienne, à travers les punchlines acerbes et dévastatrices du principal intéressé dont la performance brillante n'est pas sans rappeler celle qui lui valut l'oscar du meilleur acteur dans un premier rôle il y a quelques années (Darkest Hour, 2017). Tandis que The Player (Robert Altman, 1992) était une satire du hollywood contemporain, que Hail, Caesar! des frères Coen (2016) parodiait le Hollywood des années 1950 et que l'uchronie Once upon a time... in Hollywood (Tarantino, 2019) se penchait sur la fin de l'âge d'or hollywoodien (années 1960), Mank fait de même pour les années 1930 tout en effectuant le même procédé que Hitchcock et en cernant une période de la vie de celui qui rapportera le seul oscar (meilleur scénario original) à Citizen Kane. L'adjonction d'une mise en scène léchée, d'une reconstitution impeccable de l'âge d'or hollywoodien et d'une réflexion fine sur les mécanismes de pouvoir dans un pays qui n'a jamais cessé de fasciner ne font qu'ajouter au brio de ce film qui sauf accident devrait rafler nombreuses récompenses aux prochains Golden Globe et Academy Awards (s'ils ont lieu). Finalement, le 11ème fim de Fincher (voir la filmographie ci-dessous), le moins grand public, est le plus abouti et déjà culte. J N

Mank (David Fincher, USA, 2020, 131 min)

Cast : Gary Oldman, Lily Collins, Amanda Seyfried, Tuppence Middleton, Tom Pelphrey, Tom Burke, Charles Dance, Toby Leonard Moore.

 

Les 11 films de David Fincher

- Mank (2020)

- Gone Girl (2014)

- Millenium (2011)

- The Social Network (2010)

- The curious case of Benjamin Button (2008)

- Zodiac (2007)

- Panic Room (2002)

- Fight Club (1999)

- The Game (1997)

- Seven (1995)

- Alien 3 (1992)

10/12/2020

Citizen K

alex gibney,amazon,mikhail khodorkovsky,poutine,vladimir poutine,russie,urss,démocratie,oligarques russes,oligarchie,kremlin,ioukos,citizen kVu la recrudescence des tensions russo-américaines depuis quelques années dont le point d'orgue a été la supposée interférence russe dans l'élection présidentielle américaine de 2016 (interférence montrée du doigt dans Active Measures (2018) et The Great Hack (2019), les documentaires anti-russes et stigmatisant l'absence de démocratie dans l'Etat succésseur de la défunte Union soviétique semblent s'enchaîner.

On retrouve à la manoeuvre Alex Gibney, le documentariste des mauvais agissements. Citizen K se penche sur l'affaire Mikhail Khodorkovski. Cet ancien oligarque russe, ex-première fortune de Russie et fondateur du géant pétrolier Ioukos s'est retrouvé dans le collimateur  du pouvoir politique russe (id est Vladimir Poutine) lorsqu'il annonçait en 2003 vouloir se lancer en politique. Mal lui en a pris. Le 25 octobre 2003, il est arrêté à l'aéroport de Novossibirsk puis emprisonné pour évasion fiscale et escroquerie à grande échelle. Incarcéré dans une colonie pénitentiaire de Sibérie (à 6500 km de Moscou), il écope de 8 ans de prison, peine prolongée de plusieurs années par la suite lors d'un second procès. Il est finalement gracié par Poutine et libéré le 20 décembre 2003.

alex gibney,amazon,mikhail khodorkovsky,poutine,vladimir poutine,russie,urss,démocratie,oligarques russes,oligarchie,kremlin,ioukos,citizen kQu'Alex Gibney - considéré par certains comme un des meilleurs documentaristes du moment - plaide la cause d'un homme emprisonné pour raisons politiques et victime d'un système politique autoritaire et où l'Etat de droit n'a jamais existé est tout à son honneur, lui qui en général effectue des réquisitoires avisés contre les comportements illicites (The Arsmstrong lie, 2013), dénués d'éthique (Going Clear: Scientology or the Prison of Belief 2015), ou inhumains (Taxi to the dark side, 2008)...etc. Mais le problème ici est le raisonnement utilisé pour expliquer la guerre menée par Vladimir Poutine contre les oligarques, celui-ci cherchant (avec succès) à redresser la Russie après des années Eltsine (1991-2000) chaotiques et marquées par une collusion flagrante entre la sphère politique et les milieux économico-mafieux, instaurant la "verticale du pouvoir" et la "dictature de la loi". En effet, Gibney effectue un parallèle entre Staline et la collectivisation sanglante des années 1930. Le "Vojd" avait affirmé vouloir supprimer les koulaks (les paysans supposément aisés) comme classe sociale. Et Poutine avait affirmé vouloir supprimer les oligarques comme classe sociale.... Ce fil rouge historique est complètement dénué de pertinence. Le réalisateur américain avait d'ailleurs usé du même principe en ce qui concerne le scandale Volkswagen (il réalise l'épisode 1 de la série-docu Dirty Money qui décrypte ce scandale), faisant un parallèle entre la pratique illicite du géant allemand de l'automobile et la promotion de la "voiture du peuple" par Adolf Hitler... Marqué par un certain essentialisme et un déterminisme historique, le raisonnement global ne tient pas la route.

alex gibney,amazon,mikhail khodorkovsky,poutine,vladimir poutine,russie,urss,démocratie,oligarques russes,oligarchie,kremlin,ioukos,citizen kPlus intéressant par contre est le décryptage (mais pas assez substantiel à notre sens) à travers l'affaire Khodorkovski du chemin politoco-économique sinueux entrepris par la Russie post-soviétique. Mais là aussi, il y a des défaillances car on ne comprend pas vraiment s'il s'agit d'un documentaire sur le chaos russe des années 1990-2000, d'une réflexion sur l'ascension fulgurante de l'actuel président de la Russie ou un biopic sur Khodorkovski. Hormis ce défaut, le raisonnement, et la propagande anti-russe, Khodorkovski est présenté comme un parangon de la démocratie et un porte-flammes (russe) des droits de l'homme, lui qui a grandement participé au pillage économique dégoûtant de la Russie née sur les décombres de l'URSS. Constat final : un documentaire à regarder avec beaucoup d'esprit critique. J N

Citizen K (Alex Gibney, 2019, USA, 125 min)

 

- Présenté - Festival international de Toronto 2019

- Présenté - Mostra de Venise 2019

- Nominé (meilleur documentaire) - Festival international de Varsovie 2019

- Nominé (meilleur documentaire) - Satellite Awards 2019